Dernier jour de la 22e édition. Déjà le moment des bilans. Le premier, car nous devons encore réunir quelques informations afin de tracer l’ensemble du portrait. Ce premier bilan, celui qu’on trace encore à chaud, au moment où le tourbillon commence à ralentir, le voici tel une lettre adressée par un directeur de festival à tous les gens que la chanson, sous une forme ou une autre, à un moment ou un autre, intéresse, voire accompagne dans la vie de tous les jours. Sans parler des nuits. Bref, tout le monde.

Une édition qui a porté fruits ! Le clin d’oeil à l’image 2008 est facile mais je ne m’en priverai pas car l’expression ne pourrait être plus juste. Elle évoque le fait qu’au fil des ans le Coup de coeur s’est taillée une place bien particulière sur l’échiquier de la diffusion de la chanson tant sur la scène locale, nationale qu’internationale. Mission accomplie. La 22e édition a porté fruits parce que :

  le temps de 11 jours, 90 spectacles et 350 artistes, elle a permis de poser les réflecteurs sur la chanson. Augmentation de l’achalandage. De plus en plus, le public s’abonne à l’événement par curiosité. Celle de découvrir de nouveaux artistes. Et pour un spectateur qui assiste au spectacle, combien découvrent cet artiste via un article dans un journal, une chanson à la radio, une prestation à la télé ? Comme c’est sans doute le cas avec Andrea Lindsay qui a complètement conquis et ravi le nombreux public présent au spectacle d’ouverture. C’est aussi ça Coup de coeur.

  grand succès de la Série Au coeur de la nuit présentée en collaboration avec de redoutables complices de la scène émergente montréalaise soit l’Esco, le Divan Orange et Bande à part. Au total, 40 prestations, cette série est un petit festival à elle toute seule.

  au chapitre des ambiances particulières, on se rappellera l’énergie de Radio Radio, Gatineau, Kamakazi et eXterio, un moment de grâce à la TOHU avec Tcheka et Alfa Yaya Diallo, l’intensité de Band de garage, Avec pas d’casque et l’Orchestre du mouvement perpétuel, le charme de Bïa qui nous faisait l’honneur de sa rentrée montréalaise, le rendez-vous familial unique et festif auquel nous conviait la Montagne secrète, la sensibilité des Wriggles et de Benoit Paradis trio, les sourires en coin de Gérald Genty, Trois gars su’l sofa, Batlik et Pascal Lejeune, les cris stridents de supporters féminines des BB Brunes, le bestiaire atmosphérique de La Patère Rose et du Roi poisson et... la liste est longue et ce communiqué, l’est déjà trop.

  tout en saluant une très grande dame, la création Pauline à la page a permis de dresser des ponts avec une nouvelle génération. Merci aux Rêveurs associés.

  le Coup de coeur est présenté en novembre dans 36 villes canadiennes, permettant ainsi de faire circuler la chanson et de tresser des liens avec l’ensemble des communautés francophones.

  plus d’une vingtaine de programmateurs internationaux se sont donné rendez-vous à Montréal afin de repérer des artistes d’ici. La table ronde portant sur la diffusion de la chanson via les réseaux nationaux, intitulée Du Cap vert à Vancouver, présentée durant l’événement a connu un vif succès. Plus d’une centaine de professionnels d’ici et d’ailleurs y ont assisté.

  succès également des Midis Spectacles présentés au Bistro In Vivo où, avant de présenter un extrait de leur spectacle, 6 artistes de la programmation étaient invités à partager un repas avec les programmateurs internationaux.

  c’est dans le cadre de Coup de coeur que l’artiste belge Baloji s’est vu remettre le Prix Rapsat-Lelièvre 2008, en présence de la ministre Christine St-Pierre.

  l’image heureuse et fruitée de la 22e édition nous a valu de biens beaux compliments. Compliments rapidement transmis à l’équipe d’orangetango qui a signé l’ensemble de la campagne 2008.

  et pour tout ce qui ne se traduit pas par des mots, nous vous invitons à jeter un coup d’oeil sur les galeries photos sur le site du Coup de Coeur francophone. Vous y trouverez notamment les photos de Jean-François Leblanc qui célébrait cette année sa 20e édition à titre de complice et photographe officiel du Coup de coeur.

Avec ou sans pépins ?

Avec, bien entendu. Comme dans tous les festivals. Si dans la nature les pépins sont un maillon essentiel de poursuite de la vie, dans un festival les pépins n’ont, croyez-moi, rien de réellement indispensable. Et on les règle. Et les petits pépins deviennent rapidement anecdotes. On, c’est une formidable équipe que je salue et remercie sincèrement. Le triomphe de l’esprit de famille titrait un jour la revue française Chorus en parlant de Coup de coeur. Je ne vois pas d’autre chose.

Le pépin inquiétant ? La difficulté qui s’annonce à joindre les deux bouts, soit boucler notre budget selon nos prévisions initiales. L’annonce, quelques jours avant le festival, du retrait soudain de l’appui financier du Gouvernement canadien, dont le Coup de coeur bénéficiait depuis quelques années, afin de soutenir « spécifiquement » ses actions sur la scène internationale pèse malheureusement lourd dans cette balance. Je précise bien, « spécifiquement ».

Plus inquiétant encore, on le sait, c’est l’annonce de l’abandon définitif de ces programmes dès l’an prochain. Comme cette lettre s’adresse à tout le monde, elle s’adresse également à vous, Monsieur Harper. D’une part, parce que comme tout le monde, vous aimez sans doute la chanson et que, d’autre part, comme bien peu de monde vous êtes le Premier ministre.

Le Coup de coeur aura mis 22 ans pour développer tous ces liens qui ont fait en sorte qu’il assume aujourd’hui un leadership bien particulier sur l’échiquier de la diffusion de la chanson, tant sur la scène locale, nationale qu’internationale. Au moment où cela porte fruits, au moment où Coup de coeur a réussi à créer une passerelle unique entre les communautés francophones canadiennes et la francophonie internationale, un abandon de ces programmes d’appui qui, au total représentent des sommes bien humbles mais pour nous essentielles, aura pour effet de fragiliser énormément notre capacité à maintenir ce rôle qu’en bout de ligne seul le temps finit par confirmer.

Rappelez-vous il y a 22 ans. Peut-être rêviez-vous de devenir Premier ministre ? Si c’est le cas, bravo, vous avez réussi. Nous on rêvait de faire vivre et voyager la chanson. Je crois que nous avons également réussi. Nous partageons sans doute le même défaut. L’entêtement qui consiste à « donner des bras à nos rêves ». Je joins ma voix à celles de tous mes collègues du milieu de la musique, de la danse, du théâtre... pour faire en sorte d’avoir les appuis nécessaires afin de poursuivre notre travail. Vous venez tout juste de nommer un nouveau ministre responsable du Patrimoine canadien. Une personne au nom prédestiné, Monsieur Moore. On n’en espère pas moins.

Rendez-vous du 5 au 15 novembre 2009 pour la 23e édition du Coup de coeur francophone. 2009, année de célébration du 15e anniversaire de la création du Réseau Coup de coeur francophone présent de l’Atlantique au Pacifique.

Alain Chartrand
directeur général et artistique